En ce matin ensoleillé, le regard par la fenêtre voit un jeu d’ombre et de lumière se refléter sur les feuilles des arbres. Le silence intérieur règne. Le gazon est lourd de la rosée tendre du matin. Il est chargé de chlorophylle et embaume cet espace appelé par les rêveurs «mon terrain, ma maison».
Les branches du gros pin découpent le ciel en une fine dentelle. Ma tête repose sur l’épaule de Jean. Mon corps est immobile. Je n’arrive pas à percevoir où commence et où finit ce corps qu’on appelle Betty. Ses contours se sont effacés. Je ne perçois plus en tant qu’individu, je n’ai plus de références.
Des chants délicats et clairs se font entendre. Je ne sais pas d’où cela provient. La boîte à références est cassée. La vraie connaissance est instantanée: «C’est un oiseau qui chante!»
Où l’oiseau chante-t-i? Je ne sais pas.
Il n’y a plus d’intérieur et d’extérieur, de proche et de loin, de haut et de bas. Il y a juste la vie qui s’exprime dans le monde temporaire de la matière. La vie est parfaite, précise. Je suis la vie, le silence avant la forme dans lequel tout se manifeste.
Les grands bras du saule dansent silencieusement, l’air est chargé d’une douce humidité et regorge d’intelligence. Le chat s’amuse à chasser une feuille morte. Il la poursuit, la pousse. Elle se sauve et puis il la rattrape. Il s’amuse à croire que c’est une proie. Mon voisin monte dans sa petite voiture rouge et va travailler. Tout est si parfait et silencieux. Les formes apparaissent et disparaissent sans laisser de traces, le soleil éclaire le monde de la forme d’une douce lumière éphémère, et je suis tout cela.
Les branches du gros pin découpent le ciel en une fine dentelle. Ma tête repose sur l’épaule de Jean. Mon corps est immobile. Je n’arrive pas à percevoir où commence et où finit ce corps qu’on appelle Betty. Ses contours se sont effacés. Je ne perçois plus en tant qu’individu, je n’ai plus de références.
Des chants délicats et clairs se font entendre. Je ne sais pas d’où cela provient. La boîte à références est cassée. La vraie connaissance est instantanée: «C’est un oiseau qui chante!»
Où l’oiseau chante-t-i? Je ne sais pas.
Il n’y a plus d’intérieur et d’extérieur, de proche et de loin, de haut et de bas. Il y a juste la vie qui s’exprime dans le monde temporaire de la matière. La vie est parfaite, précise. Je suis la vie, le silence avant la forme dans lequel tout se manifeste.
Les grands bras du saule dansent silencieusement, l’air est chargé d’une douce humidité et regorge d’intelligence. Le chat s’amuse à chasser une feuille morte. Il la poursuit, la pousse. Elle se sauve et puis il la rattrape. Il s’amuse à croire que c’est une proie. Mon voisin monte dans sa petite voiture rouge et va travailler. Tout est si parfait et silencieux. Les formes apparaissent et disparaissent sans laisser de traces, le soleil éclaire le monde de la forme d’une douce lumière éphémère, et je suis tout cela.
Tout s’est arrêté dans ma tête. Ça ne discute plus, c’est la paix permanente, la grande tranquillité, l’inqualifiable Silence. L’énergie qui servait à expliquer, à comprendre, à vouloir exister, à tendre vers un but, a été libérée, et naturellement récupérée par les sens du corps, intensivement, à chaque seconde, libre de la mémoire du passé.
Les besoins émotifs ont disparu. Ils accaparaient l’énergie, densifiaient les scénarios élaborés par la pensée. Il n’y a plus d’interférences. La peur et les désirs s’en sont allés. Il n’y a plus de personnage imaginaire à justifier dans le temps, plus de questions, plus de réponses. Il n’y a personne.
On ne devient pas un être éveillé ; on arrête juste de rêver. C’est comme une fleur qui s’ouvre et diffuse son parfum. Elle ne se pose pas de questions sur qui elle est et ne se demande pas si c’est satisfaisant ou non. Elle ne cherche pas un silence imaginaire momentané, car elle est le silence.
Reconnaître que l’on rêve est un face-à-face avec le vide, ce vide silencieux que je qualifiais d’insoutenable. Il l’était en effet pour le personnage que je croyais être. Je me trompais sur le sens du mot silence, comme je me trompais sur tout: l’amour, la peur, la souffrance.
Dans cette ultime et radicale prise de conscience où tous mes paramètres de sécurité s’écroulaient les uns après les autres, le silence a pris toute la place. Il n’y avait plus personne pour poser de questions, ni personne pour y répondre.
Betty, cette créature inventée, a constaté lucidement qu’elle est un château de cartes. Le château a reçu cette certitude comme un grand coup de vent et s’est écroulé de lui-même.
Le silence ne se recherche pas; il se constate.
- Betty
Extrait du livre LA FRAÎCHEUR DE L’INSTANT, la fin d’un rêve d’individualité
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